Rendez-vous au Service Écoles-Médias (SEM) pour améliorer le déploiement d’Ubuntu Linux dans les écoles

Après mon passage à l’hôtel des finances pour discuter des améliorations possibles du logiciel de taxation GeTax sous Linux, j’ai eu rendez-vous avec un des responsables du Service Écoles-Médias (SEM) afin de discuter des problème soulevés dans un précédent article en relation avec le déploiement de postes de travail sous Ubuntu dans les écoles primaires du canton de Genève. Je remercie Monsieur Corsini pour cette invitation.

En ce qui concerne les points soulevés, en voici un résumé :

Il n’est pas possible d’écrire des caractères accentués, le son ne fonctionne pas, etc.

Suite à mon intervention et à leur expérience (pour certains des points soulevés), l’équipe technique est maintenant consciente de ces problèmes et les résoudra au fur et à mesure qu’ils visiterons les écoles concernées. Bien entendu, les enseignants qui se plaindront de ces problèmes verront leur ordinateur traité en priorité.

Il existerai pratiquement autant d’installations différentes que de postes de travail

Contrairement à ce qui m’avait été indiqué, M. Corsini indique qu’ils utilisent une image commune pour déployer leurs installation (ce qui est quand même rassurant…).

Encouragements à l’utilisation de la solution libre, ordre du bootloader

Nous avons également discuté de l’encouragement à l’utilisation de Linux en modifiant la priorité des entrées du gestionnaire de démarrage installé sur ces PCs. Pour ce point, M. Corsini n’exclue pas le fait que, plutôt que de changer cet ordre, ils décident de se passer complètement de Windows à moyen terme.

Vista -> XP (licences et remboursements)

En ce qui concerne la question de savoir si la licence de Vista qui est collée sur chacune de leurs machines et qui n’est pas utilisée leur a été remboursée, il apparaît qu’un accord a été conclu avec les fournisseurs de l’État : pour chaque licence de Windows Vista non utilisée, une copie de Windows XP peut être déployée « gratuitement » à la place.

La communication avec le public est mauvaise

J’ai finalement fait part de ma déception quant à la qualité et la fréquence des échanges par e-mail que nous avions eu précédemment (en effet, un certain nombre de mes e-mail sont restés lettres mortes). Il a aussi été question de la possibilité de distribuer les images des installations de Linux sur leur site afin de permettre à la communauté de les tester et de leur faire part des éventuelles possibilité d’amélioration. L’avenir nous dira si le SEM fera désormais preuve de plus de transparence et profitera de l’opportunité que lui offre la communauté des utilisateurs et développeurs de logiciels libres.

Conclusion

Ce fut une réunion intéressante et il semblerait que le SEM ait la volonté nécessaire à l’amélioration du déploiement actuel d’Ubuntu dans les écoles primaires (reste à savoir de quelle façon et dans quels délais).

Vu les ressources limitées à disposition (trois techniciens pour l’ensemble des écoles du canton), la première chose à faire serait, me semble-t-il, de mettre en place un VPN afin que ces techniciens puissent plus facilement intervenir et corriger les problèmes de l’installation actuelle à distance, sans devoir se déplacer dans chaque école du canton. Ceci d’autant plus que Linux se prête beaucoup plus à ce genre d’interventions à distance (sans devoir déranger l’utilisateur final) que Windows.

Ubuntu au DIP : premières impressions mitigées

Comme vous le savez peut-être, il était prévu (article de la Tribune de Genève) que toutes les écoles primaires du canton de Genève passent exclusivement à Ubuntu à la rentrée 2007.

Ma copine étant enseignante, j’ai donc pu voir à quoi ressemblait cette migration qui me tient particulièrement à cœur. Comme vous pouvez le penser, tous les ordinateurs n’ont pas été migrés du jour au lendemain en septembre, mais il semble que la migration consiste à installer Ubuntu sur les nouveaux postes de travail livrés à chaque enseignant du canton. C’est donc à cette occasion, il y a quelques jours que j’ai pu mettre la main sur un de ces nouveaux ordinateurs.

Matériel

En ce qui concerne le matériel, rien à dire ; il s’agit d’une machine basée sur un core2duo avec chipset Intel (bon choix lorsqu’on veut utiliser un système d’exploitation libre) et 4Gio de ram (ils ne lésinent pas sur les moyens, surtout lorsqu’on sait que le système d’exploitation par défaut (surprise, voir plus loin) ne permet pas d’exploiter cette mémoire).

L’ordinateur est accompagné d’un écran large 22 ».

Logiciel

C’est là que les bonnes impressions et les espérances se fanent quelque peu.

En effet, au premier démarrage, oh surprise, le chargeur de démarrage (ntdlr) propose de démarrer sous Windows XP ou sous « Linux ». Bien entendu le choix par défaut est Windows XP.

Cela pose quelques problèmes et questions :

  • Pourquoi ne pas utiliser le chargeur de démarrage d’Ubuntu (GRUB) qui est autrement plus puissant que le chargeur de démarrage de Windows (surtout que cela demande un effort supplémentaire lors de l’installation).
  • Pourquoi installer Windows XP alors qu’il ne devait y avoir qu’Ubuntu Linux sur ces machines (d’après Wikipedia, la Tribune aurait rectifié son article dans son édition du lendemain, déception).
  • Ces machines disposent d’une licence de Windows Vista, le contribuable paie donc deux fois la taxe Windows (rien ne semble en effet indiquer que l’état se fait rembourser la licence de Windows vista collée sur le boitier). De là à dire que l’utilisation de logiciels libres ne fait pas baisser les coûts d’exploitations de l’informatique au DIP, il n’y a qu’un pas.
  • Je me demande aussi pourquoi Edubuntu (qui est spécifiquement fait pour l’enseignement) n’a pas été retenu à la place d’Ubuntu.
  • Finalement, pourquoi ne pas mettre Ubuntu comme choix par défaut, en mettant Windows XP par défaut, je fais le pari que très peu d’enseignants aventureux n’oseront (ne sauront) sélectionner la deuxième entrée du menu de démarrage.

Mais le pire reste à venir. Partons de l’hypothèse qu’un enseignant décide de sélectionner explicitement ce « Linux » en appuyant sur les touches de son clavier assez rapidement au démarrage…

Il arrive sur une fenêtre de connexion assez moche (disons plus moche que la fenêtre de connexion par défaut d’Ubuntu), s’identifie et arrive sur un bureau avec un joli papier peint « Enseignement 2007-2008 ».

On remarque immédiatement quelques détails :

  • L’applet météo est utilisé alors que sa fonction est inclue dans l’applet horloge.
  • Les icônes dans les tableaux de bord sont distribuées un peu n’importe où.

Rien de très grave, vous me direz, et je serai d’accord avec vous si :

  • L’agencement du clavier n’était pas faux (ce qui empêche d’écrire une lettre accentuée, pratique pour des enseignants d’école primaire). Et ce alors que je n’ai jamais eu ce problème avec l’installeur d’Ubuntu (j’ai fait plusieurs centaines d’installation). Pour corriger ce point, il faut aller dans système/préférences/clavier/agencements/cliquer sur + (ajouter)/choisir Suisse (français) puis supprimer le mauvais clavier fr_CH et mettre le nouveau clavier par défaut en cliquant dans le petit cercle à droite de « Suisse Français »
  • Le son ne fonctionne pas (même remarque, cela a toujours fonctionné dans mon expérience, sauf si le pilote de la carte son manque ce qui n’est pas le cas ici). Pour corriger ce point, il faut aller dans système/préférences/son/mettre les trois premières options sur « détection automatique » et la dernière option sur HDA Intel (Alsa mixer) à la place de OSS.

Je me demande comment il est possible que cette installation ait passé même un test de 5 minutes d’utilisation. Je me demande également pourquoi des options par défaut qui fonctionnent très bien ont été remplacées par des options qui rendent le système inutilisable ou désagréable à utiliser. Non, je ne vais pas faire de théorie du complot, mais je n’en pense pas moins. Attendez-vous à entendre plein (enfin ceux qui auront voulu/réussi à sélectionner Linux au démarrage) d’enseignants dire « Linux c’est nul, on ne peut même pas écrire avec des accents ; et le son c’est prévu pour bientôt ? ».

Après ces quelques corrections, je continue mon exploration du système. Les documents sont stockés sur une partition NTFS ce qui est bien dans la mesure où l’on souhaite garder Windows. Là où c’est moins bien c’est que cette partition (appelée « Data ») est montée dans /media et apparaît sur le bureau et qu’ils n’ont pas fait de lien symboliques entre les dossiers Document, Musique, Images, Vidéos et les sous-dossiers de Data. Pour faire les choses proprement, il faudrait monter Data dans /mnt, puis faire des liens symboliques depuis les dossiers pré-cités (par exemple Images -> /mnt/Data/mes images). Imaginez l’utilisateur lambda qui enregistre un document depuis OpenOffice.org sous Linux espérer que ce document sera disponible sous Windows ou inversément, vive la convivialité.

Finalement le fichier de configuration de grub contient plein d’erreurs (j’imagine que ça explique pourquoi ils utilisent ntdlr pour charger les systèmes d’exploitation).

J’ai bien entendu rapporté tous ces problèmes au SEM et au projet GeLibrEdu il y a quelques jours et je vous tiendrai au courant si une réponse devait me parvenir (il y a presque un an, je les ai contacté pour leur faire remarquer qu’ils devraient corriger les occurrences de PC et Mac par Windows et Mac sur la page où ils fournissent un DVD plein de logiciels libres, je n’ai jamais eu de réponse…)

Finalement, pour mitiger les dégâts, en attendant qu’ils corrigent leurs installations, j’aide plusieurs enseignants de l’école de mon amie à faire fonctionner leur ordinateur correctement avec des logiciels libres.

Mise à jour 20 octobre 2008 : M. Jean-Luc Corsini, directeur-adjoint du SEM et responsable du secteur logistique a pris contact avec moi. Il m’indique qu’ils ont plusieurs « configurations » différentes de ces machines et qu’ils ont étudié avec intérêt mon message dont certaines remarques leur semble pertinentes et d’autres non. Il me tiendra certainement au courant de la suite donnée à mon message.

Mise à jour 18 février 2009 : J’ai rendez-vous la semaine prochaine avec la direction du SEM afin de discuter de vive voix de ces problèmes.